Pages et Plage

IDDN Certification
© Pages et Plage 2001 Création Alain Moreau

Ligne droite

LIGNE DROITE
Alain MOREAU
mini roman
 © 1998

Chapitre 1 Chapitre 2 Chapitre 3 Chapitre 4 Chapitre 5 Chapitre 6 Épilogue

Toute ressemblance ou homonymie avec des personnes existantes ou ayant existé serait fortuite et involontaire.


1



Il paraît que lorsque l’on meurt, on revoit sa vie défiler à toute vitesse.
Moi, je n’ai eu aucun souvenir, sinon celui d’une aiguille de compteur bloquée à deux cent trente et d’un camion qui semblait vouloir aspirer ma voiture.
Pourtant j’étais bien mort, car l’endroit où je me trouvais ne pouvait pas être réel.
Des êtres étranges flottaient autour de moi.
Ils ne ressemblaient à rien de connu, blancs presque transparents, sans forme, ni bras ni jambes, sans regard non plus.
Je me demandais si j’avais alors le même aspect, mais je ne pouvais pas me voir.
Nous étions des milliers.
Brusquement, il y eut comme un mouvement de foule qui m’entraîna vers un étroit couloir et là, je compris que si j’étais réellement mort, je n’étais pas au paradis mais plutôt en enfer.
Les êtres se déplacèrent à une vitesse hallucinante vers cette ouverture. Certains se battaient sauvagement et je sentis soudain une douleur fulgurante, comme un violent coup de fouet.
Sans réfléchir, je me jetai vers l’entrée en cherchant à prendre la tête de cette cohue déchaînée, stimulé par des coups cinglants.
Le couloir paraissait très long et, tout au fond, une étrange lumière, d’abord vacillante, puis de plus en plus intense, me fit comprendre que je me dirigeais tout droit vers ce qui pouvait être le paradis.
Je redoublai d’efforts.
Je n’entendais rien mais je ressentais une tension monstrueuse, comme si mes compagnons criaient derrière moi.
Plus j’approchais, plus je reconnaissais l’endroit. J’étais déjà venu ici plusieurs fois, il me semblait, mais j’étais toujours incapable de décrire la beauté de ces lieux.
Je plongeai à l’intérieur, sentant que mes poursuivants hurlaient silencieusement, dans une rage incontrôlable.
Et la douceur m’envahit…
Je flottais dans un bonheur irréel aux odeurs marines. J’étais un poisson, un oiseau, je n’étais rien mais je me sentais être. C’était bien le paradis, je le reconnaissais.
Mais pourquoi l’avais-je quitté ?
J’avais beau fouiller ma mémoire, je ne trouvais pas… Le paradis devrait être éternel !

Puis des images m’apparurent, images de rêves lointains…

Des voiles claquaient et un navire nous entraînait à toute vitesse droit vers l’horizon.
Un cri dans la hune me fit lever la tête. Le marin qui se trouvait en haut du mât gesticulait en montrant un grand vaisseau, battant pavillon anglais, à cinq mille de là.
Alors un pavillon noir fut hissé et les hommes se préparèrent au combat. Ils avaient tous des mines terrifiantes.
Notre bateau pirate mit une demi-heure à rejoindre le vaisseau amiral et les premiers coups de canons trouèrent nos tympans. Je lançai un grappin et sautai sur le pont, un grand sabre à la main et un couteau aiguisé entre les dents. Un officier anglais leva son pistolet vers moi et, lorsque je pris la balle en pleine tête, j’eus l’impression de m’envoler.

Il neigeait, je marchais péniblement sur des raquettes sommairement confectionnées. Malgré la fourrure qui m’enveloppait des pieds à la tête, je me sentais geler petit à petit.
Je décidai de m’arrêter et regroupai du bois pour faire un feu. Mes doigts gourds cherchèrent une allumette dans le fond d’une de mes poches et en tremblant j’allumai le feu.
Le hurlement d’un loup me fit frissonner. J’armai mon fusil et attendis. Les loups s’approchaient doucement, je voyais les flammes se refléter dans leurs yeux. Je savais que tant que j’aurais du bois, je resterai en vie…
Ce fut la première morsure qui me réveilla.
J’étais tombé dans un profond sommeil et le feu était éteint depuis plus d’une heure. Mon cri de douleur excita la meute, qui se jeta sur moi, tous crocs sortis sur leurs babines retroussées.

Je pédalais à tout rompre. Il faisait nuit noire mais je connaissais le chemin par cœur. J’avais relevé mes jupes au maximum pour libérer mes mouvements.
Cette fois ci, j’étais une femme.
Dans un panier, fixé sur le guidon, j’avais un maximum de victuailles pour les résistants qui se cachaient dans la montagne. Après avoir pédalé pendant une heure, je m’enfonçai dans la forêt.
Arrivée dans une vaste clairière, un hululement me fit comprendre que Louis était déjà là.
Je me dirigeai vers le son et soudain il apparut, me prit dans ses bras et m’embrassa.
Alors qu’il me couchait sous un arbre, je relevai ma jupe plus haut encore. J’avais très envie de lui.
Il me prit doucement, s’empara du panier et disparut.
Au retour, une patrouille m’intercepta.
Cinq soldats allemands m’entourèrent en ricanant, puis soudain ils me saisirent, deux par les jambes et deux par les bras, alors que le cinquième s’approchait en dégrafant son pantalon.
Il me viola d’un seul coup en riant et les autres me relâchèrent, attendant visiblement leur tour.
En feignant d’enlacer mon violeur, je sortis le cran d’arrêt qui ne quittait jamais ma manche et lui enfonçait violemment entre les omoplates. Le soldat eut un soubresaut et s’écroula.
Je me dégageai et cherchai à m’enfuir. Une rafale de mitraillette stoppa brusquement ma course.

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2


Un pâle soleil se levait sous la brume et une chaleur humide commençait à s’installer. Je sus tout de suite qu’il s’agissait de ma dernière vie. Hong Kong se réveillait ainsi que Kia, ma compagne, une tendre chinoise qui ne devait pas avoir plus de dix huit ans, pourtant j’en avais déjà plus de quarante.
Je l’avais tout simplement sortie d’une maison de passe de Shanghai, où elle avait été vendue par ses parents, dès l’âge de treize ans. Ses grands yeux noirs m’avaient séduit et elle me vouait une reconnaissance éternelle.
Brusquement tout me revint ! J’allais peut-être comprendre pourquoi j’étais mort, cette fois-ci…


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